Comparé à notre Caravelle dépouillée, le petit Maraudeur, gentiment prêté par nos amis Alain et Myriam, fait figure de confortable croiseur suréquipé, avec son cockpit auto videur, la cabine avec couchettes et panneau de pont, les coffres étanches, le moteur hors bord, le spi, …
Après une première rando test avec nos filles durant 3 jours l’été précédant, nous voilà repartis pour une semaine de cabotage le long de la Côte d’Azur, avec le même bateau et le même équipage enthousiaste.
Journal de bord
Dimanche 11 août 2002, 20h30
Voilà 3 jours que nous patientons en attendant que les mauvaises conditions météo (pluie et coup de vent) s’améliorent. A l’annonce d’une prochaine accalmie, nous prenons enfin la route pour Cogolin dans le Var.
Nous arrivons le soir chez nos cousins où nous installons notre campement à terre :
Durant la nuit, le reste de mistral, qui souffle en rafales, menace d’arracher le double toit de la tente… |
1er jour, la baie des Canoubiers
Julie (4 ans) et Léa (6 ans) embarquent avec bonne humeur pour leur seconde randonnée nautique estivale. |
La queue de mistral souffle encore fort, mais la météo prévoit qu’il va s’arrêter dans la journée, pour laisser place à un vent d’est modéré.
Nous nous régalons d’un copieux petit déjeuner préparé par nos cousins, puis nous allons mettre le bateau à l’eau aux Marines de Cogolin (mise à l’eau très pentue !).
Voiture et remorque sont ensuite ramenées en gardiennage chez les cousins.
En attendant que le mistral se calme, nous traversons la rivière de la Giscle, et accostons à quelques mètres de là, sur une minuscule plage bien abritée de Port Grimaud.
Un unique arbre nous permet de pique-niquer à l’ombre.
Le vent souffle toujours. Inutile de se hâter et de risquer de faire peur aux enfants sur l’eau.
Nous piquons brièvement une tête dans l’eau bigrement refroidie par ces quelques jours de grand vent : 18 degrés seulement au lieu des 24 degrés habituels en cette saison.
Après une balade dans les ruelles pittoresques de Port Grimaux, le long des canaux, le vent passe enfin à l’est… Tout en restant fort (5 beauforts).
Nous patientons encore 1h30 avant de pouvoir prendre prudemment la mer avec un ris dans la grand voile, dans un vent redescendu à 3-4 beauforts.
En passant devant Saint Tropez, nous pouvons enfin larguer le ris et nous voilà vite rendus dans la Baie des Canoubiers.
Le fond de la baie est calme et l’on distingue plusieurs petits pontons, tous désertés. Nous nous amarrons au ponton d’un petit chantier naval qui semble fermé. La plage, à cet endroit, est recouverte d’une épaisse couche d’algues séchées, et les 2 premiers mètres de mer sont noirs d’une poudre d’algues en cours de décomposition. Pas top pour la baignade… |
Nous partons explorer les environs. Une petite forêt de roseau constitue des toilettes naturelles idéales.
Nous passons devant un club de voile, puis arrivons à une grande plage de sable équipées de toilettes et de douches, mais pas de petit restaurant en vue.
En revenant au bateau, je croise un type qui me dévisage avec insistance. Sa tête me dit quelque chose.
Mais oui, c’est le Claude que nous avions rencontré quelques mois plus tôt au mariage de copains communs.
il est maître nageur sauveteur sur cette plage et a installé sa caravane sur un terrain à proximité. Nous voilà conviés à un succulent barbecue préparé par Martine sa compagne.
De retour au bateau, le ponton en bois s’avère bien pratique pour installer le couchage. les enfants dorment dans la cabine, pendant que nous installons un sommier à lattes et une tente igloo dans le cockpit. Claude et Martine n’en reviennent pas que nous partions en croisière avec les enfants sur un voilier si petit… |
Une musique entraînante monte dans la nuit. C’est un orchestre de Jazz qui égaille une soirée donnée dans l’une des luxueuses villas tapies dans la verdure de la colline. Nous nous laissons bercer par la mélodie.
Mais peu avant minuit, l’horreur.
Les cris d’un DJ couvrent une musique tonitruante qui envahit la baie. Un énorme yacht vient de mouiller et se transforme en discothèque de plein air.
2ème jour, le Cap Taillat
Pas de vent au réveil.
Je constate que le chantier naval est maintenant ouvert et que des personnes y travaillent. Par correction, je vais les voir pour leur demander si l’on peut rester encore quelque temps accroché sur leur ponton. ils acceptent sans problème.
Nous en profitons pour aller explorer le petit sentier littoral vers la sortie de la baie. Nous notons d’autres possibilités de bivouac, tout en admirant les belles propriétés en bord de mer, dont celle de Brigitte Bardot, située à cet endroit, et plus modeste.
Nous repartons vers midi en avançant péniblement au près dans un clapot désordonné, levé par les innombrables bateaux à moteur qui entrent et sortent du golfe de Saint Tropez.
Nous nous arrêtons au Cap Taillat. Cette magnifique réserve naturelle est fréquentée durant la journée par les vacanciers, qui n’hésitent pas à faire plusieurs kilomètres sur un sentier côtier parfois escarpé, pour venir profiter de ce lieu enchanteur. Une vingtaine de voiliers sont au mouillage et nous discutons avec quelques équipages qui débarquent le soir sur la plage pour faire courir les chiens… et leurs enfants. |
Quant à nous, nous sommes mouillés à 3 mètres de la plage, le saumon de quille du maraudeur ne nous permettant pas de venir y beacher. |
3ème jour, Cavalière
Le vent d’est, qui a soufflé une bonne partie de la nuit, est toujours là. Il nous permet de partir avant 10 heures, au portant.
Nous longeons à vive allure la côte rocheuse, plutôt hostile dans ces parages, pendant que les filles entament, dans la cabine, leur première sieste de la journée.
Petite escale ravitaillement (eau et nourriture) à Cavalaire. On repart aussitôt, fuyant le bruit et l’agitation de la station balnéaire.
En milieu d’après midi, nous décidons de nous arrêter à Cavalière où nous mouillons devant la plage.
Les fonds sont vite profonds et le ressac ne permet pas d’immobiliser le bateau suffisamment près du bord pour nous permettre d’y descendre sans trop se mouiller.
Le capitaine se sacrifie pour aller mouiller le bateau un peu plus loin et revenir à la nage dans l’eau encore fraîche.
Pendant que les filles et leur maman profite de la plage à l’ombre d’un petit pin, je parcours la cote à la recherche du meilleur endroit pour passer la nuit.
A quelques centaines de mètres, je découvre un ancien petit port privé à l’abandon. Une partie du quai et de la digue est à moitié effondrée, rendant le lieu légèrement sinistre. Mais c’est très tranquille et parfaitement abrité. |
Un petit sentier côtier permet de rejoindre le village.
Le soir venu, tout le monde se met sur son 31 pour aller au restaurant.
Nous passons le premier (hors de prix, c’est un hôtel 4 étoiles sur la plage), pour finir dans un bar crêperie, au menu plus accessible financièrement.
Seul l’écho d’une boite de nuit de l’autre côté de la baie viendra troubler la nuit dans notre petit port privé.
4ème jour, la baie du Gau et le Lavandou
Beaucoup d’humidité au réveil. L’ombre causée par la falaise empêche le soleil d’effacer les traces de la rosée nocturne. Les moustiques sont également de la partie. L’eau calme et très claire nous permet d’observer les crabes et les poissons qui se régalent des miettes de notre petit déjeuner. |
Même sous spi, le vent léger ne nous dispense pas de quelques longueurs au moteur.
Arrêt pharmacie au Lavandou pour soigner Julie qui s’est réveillée avec l’œil gonflé et difficile à ouvrir, sûrement une piqûre de moustique.
Nous repartons en direction de l’Île de Port Cros, à une dizaine de kilomètres au large.
En doublant le Cap Bénat, nous sommes cueillis par un bon force 4-5 beaufort avec une mer assez agitée (pour un petit bateau comme le nôtre).
Je préfère faire demi-tour pour aller nous mettre à l’abri de la Baie de Gau, surtout que le gréement détendu laisse le mât bouger par à coups dans les vagues.
On s’amarre à un grand ponton, à un bout de la plage. L’endroit est super pour passer l’après midi. Il y a peu de monde et des arbres sur la plage procurent une ombre reposante. On trouve même une douche d’eau douce sur la plage. |
Je reprends la météo à 16 h qui n’annonce rien de supérieur à 4 beaufort. Je décide de retenter la traversée après avoir retendu les haubans et pris un ris dans la grand voile.
Nous voilà repartis vers le Cap Bénat lorsque d’étranges nuages arrivent à quelques dizaines de mètres du sol. Ils recouvrent les collines environnantes et se déplacent rapidement.
On ne distingue presque plus les îles au large.
Nous faisons de nouveau demi tour et retournons au ponton accueillant.
Le soir venu, nous nous rendons à pied à Bormes les Mimosas, distant de quelques kilomètres de notre mouillage.
Un sympathique jeune homme nous prend en stop avec les enfants.
Nous retrouvons le petit restaurant où nous nous étions arrêtés quelques années auparavant, lors de notre rando nautique « voyage de noces ».
Après le restau, nous traînons à la terrasse d’une pizzeria pour écouter le groupe qui s’y produit.
Nous serons moins chanceux pour le retour tardif et devrons porter nos filles épuisées dans la montée…
A 4 heures du matin, je me réveille brusquement. Le vent qui était tombé s’est mis à souffler assez fort dans le sens opposé. Le bateau s’agite et vient taper de temps en temps contre le quai.
Avec Florence, nous voila dehors en pleine nuit pour déplacer le bateau de l’autre coté du ponton.
Le lendemain matin, dès qu’elle est réveillée, Léa retourne traquer le « gros » crabe à pattes velues qu’elle a aperçu la veille. Il est toujours dans son trou et pince rageusement les algues qu’elle lui tend mais ne se laisse pas déloger.
Le propriétaire du ponton qui habite la maison derrière sur la plage vient nous voir pour nous expliquer sèchement que nous n’avons pas le droit de stationner là. Nous mettons les voiles.
5ème jour, île de Port Cros
Nous repartons hâtivement et profitons d’un bon vent de force 3 pour rejoindre Port Cros en 1 heure 30.
Nous atterrissons à la plage de la Palud, déjà envahie par la foule débarquée sur l’île par navette.
Nous trouvons une place libre pour le bateau sur le petit ponton encombré et allons nous abriter à l’ombre d’un petit arbre sur la plage.
On est tous serrés, côte à côte, sur cette petite plage. L’atmosphère est bruyante.
Mais on est tous là pour profiter du trésor de cette île : son incroyable richesse sous-marine, avec une faune peu farouche.
A 1 mètres du bord, les pieds dans une vingtaine de centimètres d’eau, nous regardons, émerveillés, des dizaines de poissons qui nous tournent autour. Les plus gros dépassent les 50 centimètres de long. |
Léa se régale à les poursuivre avec masque, palme et tuba. Mais elle est tellement surprise par la ruée des poissons, lorsqu’elle leur tend un bout de pain, qu’elle préfère que ce soit moi qui les nourrisse. |
Nous fuyons ensuite cet endroit surpeuplé pour nous mettre au charmant petit port de Port Cros.
Cette première nuit dans un port est bon marché. A 0,60 € le m², la nuit nous coûte moins de 6 € pour notre petit bateau de moins de 5 mètres.
Dommage que la pénurie d’eau sur l’île l’été ne nous permette pas de profiter d’une bonne douche !
Nous partons ensuite visiter 2 des nombreux forts qui furent bâtis sur l’île. |
Après nous être goinfrés de pizzas et de glaces, nous découvrons un aspect vraiment désagréable des marinas. Les personnes qui regagnent leur bateau en pleine nuit, discutent et rigolent bruyamment sur les pontons, comme s’ils étaient seuls, réveillant tout le monde à des heures plus que tardives.
6ème jour, le fort de Brégançon
Le lendemain matin, c’est le service des poubelles qui nous tire bruyamment du lit.
Nous filons sous spi vers le continent, direction le Fort de Brégançon.
Les filles profitent de la vitesse et s’invente un jeu de « ski nautique ». S’accrochant par les mains au franc bord sous le vent, elles laissent traîner leurs jambes dans l’eau qui file, pendant que nous les assurons avec un bout. |
Nous découvrons une jolie petite crique pour installer notre dernier bivouac. L’eau s’est enfin réchauffée et nous en profitons largement : plongée sous marine, fabrication d’une piscine sur la plage, lavage au savon de mer, … |
Pour la première fois, nous nous autorisons à monter la tente sur la plage, sur les conseils d’un sympathique randonneur naturiste en Zodiac. |
7ème jour, la Londe
L’absence de vent nous oblige à regagner le port de La Londe au moteur où nous retrouvons le cousin Gilbert, venu nous y rejoindre en voiture, pour nous permettre de récupérer la nôtre.
Nous devons démâter sur l’eau, pour passer un petit pont, avant d’atteindre la mise à l’eau. Quelques heures plus tard, nous voila de retour à la maison, ravis de cette aventure familiale. |
Enseignements de cette rando nautique familiale
Le Maraudeur, malgré sa petite taille, est un engin intéressant pour randonner en famille. La cabine est spacieuse pour des enfants et les coffres de cockpit permettent d’y glisser beaucoup d’affaires. |
Lorsque le vent monte (au delà de force 4), on arrive vite aux limites du bateau pour naviguer confortablement et en toute sécurité.
2 tee-shirts et 2 maillots de bain par personne ont été suffisants pour passer cette semaine, mais une polaire n’est pas de trop le soir lorsque le vent est de la partie.
Le cockpit n’est pas très grand et notre petite tente igloo s’y glissait tout juste. Surtout avec la barre d’écoute de GV qui limite la longueur.
Prévoir une corde avec mousquetons pour assurer rapidement l’enfant qui veut jouer sur le bord du bateau en navigation.
Le saumon de quille empêche de venir beacher si la pente des fonds est trop douce. Mais l’on parvient toujours à descendre à pied dans l’eau.
Il est utile d’avoir une bonne ancre plate, et un ou deux grappins, pour immobiliser le bateau à proximité du rivage.
La cabine, contrairement à la tente, est confrontée au phénomène de condensation.
Enfin, voici comment nous avons organisé le rangement pour que les choses utiles restent à portée de main :
Récit et photos de Jean-Marc Schwartz