« L’Ile d’Elbe, ça t’intéresse ? »
Cette proposition de Jean Marc, suite aux avis de grand frais sur la Côte d’Azur pour le week-end de l’Ascension 2007, et alors qu’ici il pleut et que je viens de remettre du bois dans la cheminée, nous ne pouvons pas la refuser : « Je n’ai rien de prêt, ni même fait naviguer le bateau depuis l’hivernage, mais ça va le faire ! ».
Après une longue route depuis la Nièvre profonde, nous voici enfin à Piombino, le jeudi après-midi, en la compagnie de Mr et Mme Schwartz et Marilou.
Puis, après un jeu de piste pour trouver la cale, le temps de gréer et charger les embarcations, et il est environ 17h quand nous hissons les voiles.
Pas pour longtemps, car la légère brise qui nous accompagne ne tarde pas à tomber définitivement.
Moteur !
Pendant ce temps, chaque équipage interprète à sa manière, et donc dans une direction différente, la carte achetée quelques heures plus tôt dans une station service !
Les 2 bateaux se retrouveront comme convenu, amarrés côte à côte, dans la Cala dell’ Alga à 20 heures, après une arrivée à contre-jour dans une lumière rasante, et qui ne facilitait pas la « lecture » de la topographie du fond.
Première découverte, malgré le peu de lumière, l’eau est cependant d’une clarté rare.
Après un dîner gastronomique , les heures de route auront raison de notre envie de visiter le village de Cavo, et c’est paupières fermées que nous profiterons de cette petite anse tranquille, cernée de propriétés privées désertes à cette saison (mi mai).
2ème jour
Le vendredi matin, le temps de déjeuner, ranger les affaires, admirer les alentours, nous appareillons direction … « on verra dans quel sens nous pousse le vent ! ».
Ce sera donc vers le Sud, les conditions étant propices au rase-cailloux, nous découvrons doucement la côte orientale de l’Ile.
En milieu de journée, le vent est faible, nous décidons une pause baignade / pique-nique. La plage d’Ortano qui semblait d’abord sympathique, se révèle, au fur et à mesure que nous approchons, couverte de bains de soleil, parasols, et autres paillotes.
Tant mieux. Faisant route un peu plus loin, nous découvrons l’Ilot d’Ortano: exactement l’endroit qu’il nous fallait !
Abrités des vagues par l’îlot, les bateaux sont mouillés dans la passe avec seulement une dizaine de centimètres d’eau sous la coque !
Les eaux sont limpides, et j’y découvre rapidement une nacre dans moins de 3m d’eau : signe que l’endroit est relativement préservé.
Florence, elle, découvre des méduses; l’avantage de la nacre, c’est que ça ne pique pas !
C’est pas tout ça, le vent tourne au Nord, forcit, de plus, la «marée» descend, il va falloir penser à aller explorer plus loin…
Ce qui est étonnant à Elbe, c’est de découvrir la côte préservée. Nous nous attendions à un endroit «bétonné». Non, ici la verdure est reine, ne laissant entrevoir que quelques ruines d’installations de carrières et des villas éparses.
Evidemment, à Porto Azurro, l’activité étant beaucoup plus importante, nous passerons donc notre chemin.
L’après-midi se poursuit, les 2 trimarans naviguant côte à côte, au gré des rafales et des «déventes», des adonnantes et des refusantes : bref, c’est la Méditerranée.
En passant sous le vent de l’île, des effluves de maquis nous rappellent la Corse.
Quand l’heure de trouver un coin pour passer la nuit approche, nous sommes au pied du village de Capoliveri. Toutes les plages abritées du vent de nord qui a forci sont encore bien peuplées de baigneurs, nous attendons donc en faisant des ronds dans l’eau, puis nous procédons à un atterrissage sans utiliser le moteur afin d’éviter le courroux de la population locale …
Après une rapide préparation des bateaux pour la nuit, nous montons au village pour voir à quoi ressemble l’île de l’intérieur… et aussi manger une bonne pizza en goûtant un petit vin local !
3ème jour
La nuit est calme sur la plage de Barabarca, et la journée suivante commence tout en douceur…
Plus tard, grâce aux informations de Pierre et Laurent, nos relais météo téléphoniques, nous décidons de poursuivre le tour de l’île alors que Jean Marc et Flo doivent faire demi-tour pour être rentrés le dimanche soir.
Nous naviguerons ensemble jusqu’au Capo Stella et pendant qu’ils remettront le cap à l’est, nous partons explorer tour à tour le Golfo della Lacona, puis le Golfo di Campo qui forme un triangle, dont les coins sont à l’ouest : une marina, à l’est : une décharge, et au sud ouest : une sympathique plage déserte.
La spaggia Galanzana dont l’accès est protégé par un haut fond, qui ne doit pas caler plus de 50 cm de hauteur d’eau. On y arrive donc dérive et safran escamotés.
On est au milieu de la journée, il n’y a pas un chat, l’eau est cristalline : toutes les conditions sont réunies pour sortir le pique-nique, et encore les palmes, masque et tuba.
Puis le vent se renforce. Nous en profitons pour avancer un peu.
En arrivant, il était plein sud, et là, le temps de sortir du golfe, et il passe à l’ouest, le farceur. Nous tirons donc des bords, doucement le long de cette côte accore, toujours recouverte d’un maquis épais.
Maintenant, nous distinguons nettement la silhouette de la Corse, avec encore de la neige sur les sommets ! Elle est si proche, ça donne envie de traverser, même avec une petite embarcation comme la notre !
Nous passons le hameau de Cavoli dont l’anse pourrait faire une escale pour la nuit, mais à 16h, il y a encore beaucoup de monde pour un si petit endroit.
Nous poursuivons vers le Golfo di Barbatoia, qui fera un excellent abri contre le vent d’ouest.
A tel point qu’une quantité impressionnante de croiseurs divers y est déjà mouillée. De plus, la plage est couverte de parasols, et de toute façon l’accès en est barré par une ligne de bouées !
Il est 17 heures, s’il faut attendre 20h pour pouvoir tenter un atterrissage, et risquer de se faire jeter sous prétexte qu’il s’agit d’une plage privée…
Bien que la côte ouest soit inhospitalière par vent d’ouest, nous profitons de ce que celui-ci ait forci pour essayer de monter jusqu’à St Andréa, au nord ouest d’Elbe.
Nous enfilons les coupe vent, obturons l’extrémité du bout dehors du Magnum [pour ne pas embarquer trop d’eau dans le coffre avant], et nous voilà parti à tirer des bords dans les vagues et l’écume: « On essaie, et si ça mouille trop, ou si le vent monte de trop, demi-tour ! ».
Non, les conditions resteront correctes, il faut juste laisser filer les écoutes de temps en temps dans les rafales, mais pas de trop, car nous avons trouvé un camarade de jeu sur un gros quillard de 45 pieds qui semble prendre la même direction que nous.
Il est plus rapide au près dans le clapot, mais curieusement, nous faisons un meilleur cap, surtout que le vent diminue progressivement.
Nous continuons notre progression vers le nord, sur une mer redevenue calme quand nous passons la Punta Polveraia.
Notre concurrent, lui, s’éloigne vers l’Ile de Beauté.
Il est 20 heures quand nous arrivons au moteur à St Andréa. Le vent est complètement tombé, et il va être temps d’installer le campement.
L’endroit est certes légèrement « urbanisé », c’est un village, mais nous n’avons plus le choix à l’heure qu’il est, et la présence d’estaminets me fera oublier les gamelles en alu que, dans la précipitation, j’ai laissées à la maison, et sans lesquelles le réchaud est inutile !
Lors de l’installation du couchage, j’observe que malgré l’absence totale de vent, un train de vagues arrive de temps en temps face à la plage, de plus, aucun bateau n’est amarré au quai pour la nuit. Je vais donc écarter le Magnum de la plage, ce sera plus prudent.
Pendant ce temps, notre ex-concurrent de retour, mouille un peu plus loin et descend sur la plage avec son annexe, tout près de notre embarcation. Nous sommes là depuis ¾ d’heure !
Il passe à côté sans nous dévisager, alors que nous tirions des bords à moins de 20m de distance pendant près de 1 heure 30 ! Aucune trace de fair-play chez cet individu !
Ne le fâchons pas, nous irons arroser cela sur cette sympathique terrasse à l’autre bout de la plage : il faut bien se réhydrater …
Toute la nuit, ces trains de petites vagues nous berceront de temps en temps, mais rien de méchant ni même inconfortable.
4ème jour
Le lendemain matin, au moment où nous appareillons, le moniteur de plongée local nous demande si la nuit était tranquille, si nous n’avons pas été trop secoués… Même s’il constitue le seul abri contre le vent de nord ouest par ici, l’endroit a sa réputation !
Nous arrivons en fin de matinée à Marciana Marina, l’idée étant de laisser le bateau à l’abri, et de monter à pied jusqu’au téléphérique qui mène au sommet de l’île.
Après une visite du village, et un casse-croûte, nous demandons la distance exacte pour rejoindre le téléphérique : presque 10 km. Deux heures aller sous le soleil de plomb, plus l’excursion, puis le retour…
il sera tard et nous devrons passer la nuit dans la marina. De plus, il reste pas mal de côte à explorer sur les 2 jours qui nous restent ici.
Nous repartons, direction sud-est, explorer le fond du Golfodi Procchio en rasant les cailloux, poussés par une très légère brise.
Les maisons luxueuses, cachées dans la végétation, possédant pour la plupart un petit port privé, se succèdent.
Le paysage n’est pas défiguré et conserve un côté très nature. Même les petits abris à bateaux sont souvent constitués de tas de rochers, plutôt que de béton armé bien blanc.
De belles naïades bronzent sur les rochers, mais Sylvie, ma coéquipière trouve qu’il n’y a pas assez de fond pour s’approcher plus sans risque pour la sécurité du bateau … !
Nous voici déjà à Isola Paolina. Bien sûr, nous tentons le passage entre l’îlot et la terre ferme, et manifestement, la hauteur d’eau sous le bateau ne va pas tarder à être critique.
Nous choquons les bouts qui retiennent la dérive et le safran. Heureusement, nous glissons tout doucement sur l’eau, on a le temps de manoeuvrer si nécessaire. Les voiles sont choquées en grand, car nous commençons à voir l’ombre du mât sur le fond, signe que ce dernier n’est pas loin !
L’endroit est magnifique, la pause s’impose, et en avant pour la balade avec palmes, masque, tuba !
Les quelques petites plages à l’ouest de la Punta Agnone sont des petits écrins paradisiaques de tranquillité; à l’est, c’est le royaume des bains de soleil et des parasols.
Nous remontons vers le nord, en passant l’anse de Porticciolo qui abrite une magnifique petite plage, puis, au fur et à mesure que nous progressons, la couleur de la terre et des rochers passe doucement de l’ocre au blanc.
Nous contournons le Capo d’Enfola… puis nous longeons la Spiaggia di Capo Bianco qui porte bien son nom.
Nous entrons ensuite dans la rade de Portoferraio, dans l’espoir de trouver un endroit abrité du clapot de nord-ouest qui ne rend pas les beachages confortables.
Après une visite de la rade, il est 20 heures quand, n’ayant pas trouvé le petit coin rêvé pour passer la nuit, nous échouons le bateau en face du port, sur la plage d’un petit club nautique.
Ici, les eaux peu profondes, chargées d’alluvions, et remuées par le ballet incessant des ferries, n’incitent pas du tout à la baignade. Par contre, la plage est tranquille, nous dormirons comme des loirs…
5ème jour
Cette dernière journée de rando s’annonce estivale comme les précédentes, et après avoir terminé la boucle, et fait un tour à Cavo, nous devrions pouvoir rentrer à Piombino pour ce soir.
La navigation jusqu’au Capo Vita, offre de magnifiques paysages sur une côte restée sauvage, quelques jolies anses, hélas pas abritées du nord ouest, et une coquetterie géologique au pied du Mont Grosso.
Nous passons peu après le Capo Vita…
Au fond, le continent, à gauche, l’Ilot de Palmaiola, avec son phare qui nous a guidés lors de notre arrivée. Nous poursuivons jusqu’à Cavo, pour le pique-nique, la baignade, tellement nous ne sommes pas pressés de finir cette balade.
La plage de Cavo est déserte, la mer est calme, nous commençons à mouiller le bateau le plus près possible de la grève. Un élégant personnage habillé en uniforme marin blanc s’adresse à nous.
Je lui réponds en anglais que je ne le comprends pas, donc il me répond, en anglais, qu’il est interdit de mouiller un bateau aussi près d’une plage, et que nous avons de la chance qu’il soit de bonne humeur et qu’il n’y a personne sur cette plage, sinon nous avions droit à 250€ d’amende !
Je ne lui ai pas avoué que nous n’avions fait que ça pendant 4 jours, mais je n’ai pas eu le temps de lui demander plus de précisions car il me coupa sèchement d’un « Please, leave right now ! ». La personne qui l’accompagnait nous proposa de laisser le bateau quelques heures au port.
J’espérais, ce faisant, pouvoir interroger l’homme en blanc, mais il avait disparu avant que le trimaran ne soit amarré.
Le capitaine du port lui, parlait aussi bien le français ou l’anglais que je parle l’italien, je n’ai donc pas eu beaucoup plus d’information.
Un dernier petit tour dans les ruelles de Cavo, un dernier café, une dernière baignade dans les eaux cristallines d’Elbe , puis ce seront 2 heures de navigation direction le smog de Piombino.
Quatre jours suffisent pour boucler le tour d’Elbe en flanant sur des petits bateaux dans du petit temps. A cette époque, l’activité tourstique est modérée, on peut encore trouver des endroits tranquilles.
En bonus, si on a du temps, l’intérieur de l’île mériterait d’y consacrer un peu de temps. On dirait un peu le littoral Corse, par les reliefs, la végétation, les senteurs.
Le bonus plus, serait aussi d’aller faire un tour du coté de l’Isola Pianosa, au sud, et éventuellement Capraia au nord ouest. Mais pour ça, il faut se préparer, avec les cartes, de quoi prendre la météo,… et se renseigner sur la législation !
texte et photos de Marc Slaney, septembre 2007
Miguel MOUTOY Belgique
24 Sep 2007Superbe récit que le vôtre!
J »ai découvert cette île en 1996 et je n »arrête pas d »y retourner chaque année (Maggio Napoleonico)avant… de bientôt m »y installer définitivement!
Pour l »île de PIANOSA, les visites y sont sévèrement contrôlées et il vaut mieux s »adresser avant à la commune de CAMPO NELL »ELBA de laquelle elle dépend administrativement. Si vous souhaitez un adresse et des références, vous me faites signe (immortels@skynet.be)
Avec votre autorisation, je place votre randonnée sur mon forum:
http://elbe.activebb.net/
Bonne continuation et encore bravo.
Marc (sur Virus)
27 Sep 2007…Voilà enfin l »explication sur les 3 abeilles, et sur bien d »autres choses ! Super site, pour les « révisions » avant de visiter Elbe.
Si ce récit mérite de figurer dans ce forum, j »en suis ravi !
Je comprends cette envie de s »y installer, l »endroit est magnifique, j »y retournerai aussi.
vaiedelich
5 Juin 2015tente centrale magnum
Bonjour,
Je navigue sur un magnum 21 et je voudrais l'équiper d'un bivouac sur la coque centrale. Pourriez vous me dire comment vous avez équipé le votre?
merci d'avance
Stéphane
Jmarc
6 Juin 2015tente centrale magnum
@ vaiedelich : Marc a décrit en détail son système de couchage sur cette page : [section=5426]
Tu trouveras plein d'exemples différents dans le dossier [section=4957]