Mâts aluminium et carbone
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Mâts aluminium et carbone

Des infos intéressantes transmises par Phil (Winnie) sur les mâts en aluminium et les mâts en carbone…

Quelques notions sur les mâts et sur le carbone

Extrait d’une présentation de A.Bujeaud au colloque Jauge de l’ENV (novembre 2005).

Efforts supportés par les mâts

Les mâts subissent des efforts dynamiques et cycliques :

  • de flexion, exercés par les voiles sous l’effet des écoutes, du hâle bas et du vent, et par le pataras: cintrage longitudinal (recherché) et transversal (contrôlé par les barres de flèche)
  • de compression ou flambage, exercés verticalement par le gréement dormant (haubans, galhaubans, bastaques, étai) composante verticale de l’effet du vent sur les voiles et par les drisses , transmis à la coque par le pied de mât.

Pour définir les caractéristiques des mâts capables de résister à ces efforts qui restent mal connus car complexes, architectes et constructeurs définissent les profils par leur Moment d’inertie (I) et leur module de flexion (I/v).

[…]

Mâts en alliage d’aluminium

Ils ont commencé à remplacer les mâts en bois au début des années 60.

Profil obtenu par filage

La majorité des mâts est réalisée par filage : un lingot d’alliage d’aluminium chauffé près de sa température de fusion est poussé par un vérin hydraulique dans une filière qui a la forme de la section désirée ; le profil sort de la filière comme un macaroni, il est saisi entre des pinces et étiré pour le rendre rectiligne, puis tronçonné à la longueur voulue ; il est alors dans un état semi-écroui et trempé naturellement à l’air ; il peut encore subir un étirage à froid pour augmenter ses performances par écrouissage et des traitements thermiques (recuit, trempe,revenu) qui lui donnent les caractéristiques mécaniques recherchées ; enfin il est lavé (solution d’acide nitrique) et livré au fabricant de mâts.

L’alliage utilisé doit être assez ductile pour être filé, présenter les caractéristiques mécaniques voulues, avoir une bonne résistance à la corrosion et être soudable : ceci limite la composition chimique de l’alliage et les traitements possibles ; les alliages à performances élevées obtenues par des opérations complémentaires (laminage, forgeage) , utilisés en aéronautique, ne peuvent être utilisés. Les alliages utilisés sont en général de la série 6000 (magnésium 0,6 à 0,8 %, silicium 0,4 à 0,8 %, ex AGS ou ASG), trempants.

Le fabricant de mât exécute éventuellement le rétreint du sommet (sciage en vé étroit sur quelques mètres, rapprochement des lèvres, soudure TIG ou MIG), les usinages (perçages, fraisages, emboutissages, tronçonnage), soude les pièces rapportées ( embases de barres de flèche, tête de mât, etc.), puis réalise la protection par anodisation sulfurique et colmatage avant de l’équiper de son accastillage. L’engoujure fait partie du profil.

Caractéristiques de l’alliage 6060 : masse volumique : 2,7 g/cm3, Rr : 220 à 250 Mpa, dureté Brinell : 75 à 90, résistance à la fatigue (108 cycles) 70 à 80, module d’élasticité : 70000 Mpa, coefficient de dilatation : 2,35 x 10-5 (acier 1,2 x 10-5)

Tubes en alliage à hautes performances

Autre procédé utilisé pour des mâts de petite section (dériveurs) (Z Spars, Needle) : utilisation de tubes en alliage à hautes performances obtenus à partir de tôles laminées à froid, donc très écrouies, roulées puis soudées.

L’alliage est de la série 7000 (zinc 5 à 8 %, magnésium 1,5 à 3 %, cuivre 0,2 à 2 %, ex AZ5GU ou AZ8GU); le soudage en continu par bombardement électronique, très local, ne modifie pas les performances du tube. Le sommet, n’étant pas soudable du fait de la composition de l’alliage, notamment pour ceux forts en cuivre, est rétreint mécaniquement par moletage ou martelage ; l’engoujure est rapportée par rivetage. La section (diamètre extérieur 55 à 60 mm, épaisseur 2 à 3 mm) présente un module de flexion (I/v) inférieur à celui d’un mât filé prévu pour le même usage, une traînée inférieure, une meilleurs nervosité et une meilleure tenue à la fatigue.

Caractéristiques : masse volumique : 2,8 g/cm3, Rr : 500 à 550 Mpa, dureté Brinell : 130 à 150, résistance à la fatigue (108 cycles)150 à 160, module d’élasticité : 72000 Mpa, coefficient de dilatation 2,3 x 10-5

Très sensible à la corrosion électrolytique, le corps du mât doit être isolé des autres métaux, l’inox en particulier (accastillage, drisses).

Mâts Carbone

Ils sont réalisés en matériaux dits «composites».

Les matériaux composites ont 2 constituants :

  • Le renfort assure la performance mécanique (résistance à la traction, rigidité), il est de nature filamentaire : fibres minérales (bore, carbure de silicium, quartz) ou organiques (polyester, aramide, carbone) longues,
  • La matrice lie les renforts, répartit les efforts sur les fibres (résistance à la flexion ou la compression) et assure la protection chimique ; c’est un polymère, une résine organique.

Le renfort

Les fibres utilisées dans les composites à hautes performances peuvent être en verre R (silione), en aramides (Kevlar …), en carbone « haute résistance ». Elles doivent présenter une bonne adhésion avec la matrice et supporter sa température de réticulation, aux environs de 120 °C.

Dans le cas des mâts, on recherche des performances élevées et on utilise des fibres de carbone dites »haut module ».

Nota : on se souvient que les établissements Deschamps, constructeurs du Ponant, fabriquaient des mâts en verre R/résine polyester dans les années 70.

Fabrication des fibres, généralités

La fibre de carbone a été « inventée » par des chimistes anglais dans les années 60

Ces fibres sont produites à partir de brais (résidus de la distillation du pétrole), ou de différents polymères (cellulosiques, rayonne, polyester, etc.), mais les fibres « haut module » sont obtenues aujourd’hui en partant d’un polymère acrylique, le poly acrylonitrile (PAN).

Les granulés sont dissous dans un solvant, passé à l’état pâteux dans une filière ; les fibres coagulées sont étirées pour former le « précurseur », fil blanc et fusible.

Ce fil, oxydé entre 200 et 300 °C, devient noir et infusible, puis carbonisé (ou pyrolysé) entre 1000 et 1500 °C sous atmosphère neutre (azote) pour former les fibres « module intermédiaire » et « haute résistance », qui sont ensuite « graphitisées » entre 1800 et 2500 °C pour devenir des fibres « haut module ». Pendant ces opérations, le polymère de départ perd successivement ses atomes d’hydrogène, d’azote et d’oxygène et il ne subsiste que les atomes de carbone en chaînes hexagonales . Simultanément, on peut lui faire subir des étirages destinés à améliorer ses performances, des traitements de surface et un ensimage.

Les fabricants, essentiellement américains et japonais, commercialisent les fibres sous forme de fils, de mèches, de fibres courtes, de scrims, de tissés (2 et 3 D), souvent pré imprégnés.

Très grande variété de fibres aux performances très étendues et adaptées à leurs utilisations.

Points forts et points faibles de la fibre de carbone

Forces et faiblesses

Excellentes propriétés mécaniques

Très bonne tenue en température

Dilatation thermique nulle

Bonne conductibilité thermique et électrique

Usinabilité aisée

Bonne tenue à la fatigue

Masse volumique < 2

Prix élevé (énergie dépensée)

Fibres cassantes

Fragile au choc et à l’abrasion

Mauvais comportement chimique : Amagnétique et perméable aux rayons X avec l’oxygène > 400 °C , les acides, les métaux (corrosion galvanique)

Adhésion médiocre aux résines

Les fibres finies, de 6 à 12 μm de diamètre, sont réunies en mèches qui sont préparées suivant différentes textures :

Unidirectionnelle : fil, nappe

  • Par le producteur de fibres

Non tissée : mat ou scrim

  • Par le producteur de fibres

Tissée

  • Par des tisseurs professionnels

Tressée

  • Par des tisseurs professionnels

Les produits semi finis peuvent être livrés imprégnés de résine et donc prêts à l’emploi.

La matrice

On utilise des résines époxydes, thermodurcissables liquides, pour leurs qualités d’adhérence aux fibres et leurs performances mécaniques ; elles réticulent (polymérisent) grâce à un durcisseur, à chaud :

  • par chauffage à air chaud (étuve) ou sous gaz neutre (autoclave),
  • par chauffage infra-rouge,
  • par effet diélectrique (les fibres de carbone sont bonnes conductrices de l’électricité),
  • par chauffage à micro-ondes,
  • par irradiation (rayons gamma) ou ionisation (bombardement électronique ou rayons X).

Forces Et faiblesses

Bonnes propriétés mécaniques

Assez bonne tenue en température

Stabilité dimensionnelle

Résistance à l’abrasion

Grande adhérence sur autres matériaux

Faible retrait au moulage

Sensibilité à l’humidité et aux UV

Vieillissement sous température prolongée

Sensible aux chocs thermiques

Observation : les caractéristiques du composite obtenu (suivi et régularité dans la production, homogénéité) permettent de réduire le coefficient de sécurité qui est couramment de 1,5 pour les structures aéronautiques ou spatiales, contre 3 à 5 pour les structures métalliques

Les procédés de fabrication des mâts

Le nappage sur mandrin

Le tissu pré-imprégné est enroulé sur un mandrin en alliage d’aluminium en plusieurs couches et passé en étuve ou en autoclave.

Ce procédé est utilisé par HALL Spars and Rigging (USA et Hollande) : l’ensemble est enfermé dans une baudruche dans laquelle on fait le vide, puis introduit dans un autoclave et cuit sous 6 bar à 120 °C. La dilatation de l’aluminium étire le pré-imprégné, étirage qui s’ajoute à la dépression dans la baudruche et la pression dans l’autoclave pour améliorer les performances du composite, dont les fibres ne sont pas interrompues.

Mâts de MUMM 30, Class America

Le nappage en moules femelles

On utilise deux demis moules qui s’assemblent (plan de joint) suivant le plan transversal d’épaisseur maxi. Les moules des fabrications de séries sont fréquemment réalisés à partir d’un mât en aluminium.

Le nappage, généralement en tissu pré-imprégné, est fait à la main dans les moules, et il inclut les renforts locaux (capelage du gréement, barres de flèche, cloche de tangon, vit de mulet, pied de mât) et les tissus de recouvrement avec l’autre demi moule ; avant l’assemblage des deux demis moules, une baudruche est mise en place pour assurer la pression de la stratification, puis gonflée après fermeture du moule.

L’engoujure, en alliage d’aluminium anodisé dur, est généralement posée en premier dans le moule, isolée de la résine par un film pour permettre son coulissement. Sur les mâts de forte section, ajout possible de mousse ou de nid d’abeille. Cuisson en étuve aux environs de 120 °C. Puis usinage et accastillage.

Avantages et inconvénients

Contrainte uniforme et adaptée localement

Bel état de surface

Investissement normal (moules et étuve)

Procédé manuel et donc artisanal

Coût élevé

Nécessite un contrôle structurel

Solution intéressante à l’unité et en petite série.

Procédé utilisé par LORIMA à Lorient (Eric Duchemin) pour Z Spars, par JMV pour Sparcraft à Saint Vaast et de nombreux constructeurs européens.

La pultrusion

Les mèches de fibres sont imprégnées de résine par passage dans un bain, ou pré-imprégnées, et passent dans une filière en acier (qui a la forme du profil recherché) d’environ 1 mètre de long et chauffée aux environs de 200 °C ; le produit, déjà durci en fin de filière, en est extrait par un système de tirage puis tronçonné par une scie suiveuse.

La vitesse de sortie est de l’ordre de 0,5 m/mn. L’engoujure fait généralement partie du profil mais peut être rapportée.

Avantages et inconvénients

Procédé industriel

Coût intéressant

Bon état de surface

Profil de section constante donc I/v constant

Renforts par apport extérieur ou fourrage

Investissement important

Procédé exploité par Stabmasts (Christophe Auguin) à Avranches.

On peut penser que c’est l’avenir pour les bateaux de série !

L’enroulement filamentaire

Sur un mandrin en rotation, qui a la forme de l’intérieur du profil voulu (comme le nappage sur moule mâle), une machine à commande numérique dépose des fils préalablement imprégnés ou pré-imprégnés. Les renforts sont réalisés par des enroulements plus denses aux endroits voulus et les fils peuvent être mieux orientés dans le sens des efforts. La forme du mandrin doit tenir compte de l’épaisseur finale de l’enroulement, en particulier au niveau des renforts.

Le mandrin peut être :

  • démontable, généralement métallique et protégé de l’enroulement par un film
  • ou perdu, en résine expansée ou en mousse qui disparaissent à la cuisson.

L’état de surface rugueux peut être amélioré par un film portant un satin de finition.

L’engoujure, généralement en aluminium, est rapportée par un système permettant le coulissement (effet de cintrage, dilatation hétérogène).

Procédé très utilisé dans l’industrie spatiale et par ALUCARBON à Thann.

Contrôles de fabrication

Ils sont importants car le moindre défaut d’imprégnation ou la présence de bulles peut entraîner un délaminage. Les contrôles non destructifs sont :

  • Le ressuage, en utilisant des agents pénétrants,
  • L’échographie par ultrasons qui révèle les hétérogénéités de structure,
  • La radiographie (rayons X),
  • La thermographie,
  • L’holographie à laser (franges d’interférence sous contraintes).

[…]

De A.Bujeaud, 23 novembre 2005 (http://www.ffvoile.org/ffv/public/fond_doc/cca/formation/mats_carbone_nov05.pdf)

Aluminium et alliages d’aluminium


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